BON A SAVOIR

CRÈCHES ET SANTONS

Un peu plus de deux milliards et demi de fidèles dans le monde s'apprêtent à fêter Noël. Pour la plupart d'entre eux, la crèche est l'emblème de cette fête religieuse. Que savons-nous de ce symbole ?

Les évangiles de Luc et de Matthieu en donnent l'origine : naissance de Jésus, sans mentionner le jour de sa naissance, annonce aux bergers et aux Rois Mages. L'évangile selon Saint Luc rapporte que l'enfant Jésus fut déposé dans une "mangeoire", qui se dit "scripia" en latin, d'où est issu le mot "crèche" !

Côté célébration de Noël, on en trouve trace qu'à partir du 4ème siècle. Des écrits anciens relatent une célébration de Noël, en l'église Sainte-Marie Majeure de Rome, pendant la nuit du 25 décembre, par le Pape Liberio, qui aurait fait dresser une sorte d'étable sur l'autel où la messe de minuit avait été célébrée. Ce qui permit de parler de "pré-crèche".

Lorsque l'on s'intéresse aux personnages qui habitent la crèche, jusqu'au 13ème siècle, on ne les trouve que sur des bas-reliefs, avec Marie allongée à côté de l'enfant Jésus. Mais, au 13ème siècle, tout change. Les études de Saint-Thomas et de Saint Bonaventure rendent impossible la représentation de l'accouchement de la Vierge comme celui d'une simple mortelle. Dès lors, Joseph et Marie sont représentés à genoux, adorant leur enfant. Seuls, le bœuf et l'âne les accompagnent dans la crèche.

C'est au Moyen Age, dans ce même 13ème siècle, qu'apparurent les crèches vivantes, des crèches grandeur nature où Jésus, Joseph, Marie, les bergers les rois mages étaient joués par des habitants des villages, devant les parvis de certaines églises d'Italie du Sud, accompagnés de vrais animaux !

Pour les santons, la légende prétend que François d'Assise, à Naples, devant une de ces crèches, aurait eu l'idée de fabriquer des personnages avec de la farine, du sel et de l'eau, donnant naissance aux premiers santons italiens, les "santibelli". Progressivement, ces personnages fabriqués avec des matériaux bon marché (plâtre, bois, cire, carton-pâte, faïence) remplacèrent les acteurs des crèches vivantes. Mais il fallut attendre le 16ème siècle pour voir apparaître dans les églises, des crèches semblables à celles que nous connaissons. Quant aux "santibelli" colorés ils n'apparaîtront vraiment qu'au 18ème siècle.

L'arrivée de ces figurines ouvrit un nouveau chapitre de l'histoire des crèches. Au 18ème siècle, elles se mirent à entrer dans les familles, notamment dans les familles aristocratiques napolitaines. Composées de matériaux pauvres : le bois, la pierre, le liège, la paille, elles reproduisaient la vie quotidienne des Napolitains, témoignant leur dimension populaire.

En France, à cette époque, la politique anticléricale des gouvernements révolutionnaires entraîna la fermeture des églises, et donc, la fin des messes et des crèches de Noël. Pour les Provençaux, fervents chrétiens, c'en était trop ! Ils se mirent à confectionner leurs propres crèches, à domicile, en modèle réduit, prémices de la tradition des santons de Provence, et clin d'œil de l'histoire, c'est la Révolution Française qui a permis cet essor.

Pour créer leurs figurines des artisans provençaux s'inspirèrent de leur environnement, de leur famille, des personnages typiques de leur village ou de leur région, et pour finir, ils rajoutèrent "les santons" (petits Saints en provençal), ambassadeurs des petits métiers qu'ils côtoyaient quotidiennement : berger et ses moutons, meunier et ses sacs de farine, pécheur, rémouleur et sa grosse meule, lavandière…

Initialement, ces personnages étaient assez fragiles. En 1798 Jean-Louis Lagnel découvrit, par hasard, près d'Aubagne, que l'argile humide se travaillait très bien. Avec cette terre, il fabriqua une crèche et quelques santons qui eurent immédiatement un grand succès. Il mit alors au point un procédé de fabrication peu coûteux, toujours utilisé de nos jours. Cette technique, adoptée par de nombreux artisans, permis un développement important de cet artisanat. Le métier de santonnier était né.

En 1808, Jean-Louis Schlegel exposa pour la première fois ses créations à la Foire aux santons de Marseille.

Pendant ce temps, les santons de Provence asseyaient leur renommée et rivalisèrent même avec leurs cousins italiens, les santibellis, réalisés en plâtre

Jean Pierre OLIVIERO